05 | Avis sur le projet de Voluntary National Review 2023

  • Demandé par la Conférence Interministerielle Développement Durable, dans une lettre datée du 13/02/20232
  • Préparé par le groupe de projet VNR 2023
  • Avec le Minaraad, SERV, CESE Wallonie, Brupartners und der Wirtschafts- und Sozialrat.
  • Approuvé par l’Assemblée générale par procédure écrite le 13 avril 2023

Avis (pdf)

 

 

Résumé de l’avis

Notre pays soumettra pour la deuxième fois un VNR au HLPF en juillet 2023. La CIMDD a demandé à un certain nombre de conseils consultatifs de rendre un avis sur le projet de texte de ce VNR. Les conseils suivants ont approuvé l’avis : CFDD, Minaraad, SERV, CESE Wallonie, Brupartners et Wirtschafts- und Sozialrat.

Dans cet avis commun, les conseils considèrent que l’élaboration d’un VNR est l’occasion de procéder à une évaluation approfondie de la mise en œuvre des SDGs. Alors qu’un premier VNR est généralement une « mesure de référence », un deuxième VNR devrait être beaucoup plus une évaluation qui jette un regard critique sur les propres performances des autorités. Cette évaluation devrait alors conduire à de meilleures réponses politiques aux principaux défis sociétaux.

Ce n’est pas le cas dans le projet présenté. Une évaluation autocritique est insuffisante ou absente du texte. Les différents gouvernements de notre pays devraient davantage utiliser l’exercice VNR pour renforcer la volonté politique d’une coopération concrète en faveur du développement durable, dans le respect des compétences de chacun.

La préparation du VNR par les différents gouvernements n’a pas été optimale, avec notamment l’incapacité de la CIMDD à fonctionner pleinement entre 2017 et 2022. Le texte sur lequel les conseils consultatifs ont dû donner leur avis est également incomplet. Les conseils apprécient le choix de la CIMDD de faire plus de place à la participation de la société civile lors de la préparation du VNR. De nombreuses organisations ont fait part de leurs propositions et de leurs attentes à l’égard du VNR. Mais la façon dont le processus s’est déroulé après la présentation de ces contributions en octobre 2022 n’a pas permis à la société civile d’avoir l’impression que la CIMDD avait réellement fait quelque chose de ces contributions.

L’avis examine les différents chapitres du projet de VNR. L’impression générale est que le texte dont les gouvernements sont responsables cherche principalement à dresser un tableau positif et n’est pas suffisamment autocritique. En outre, ce tableau ne reflète pas suffisamment le grave manque de coopération entre les différents niveaux politiques, comme l’indique également un audit de la Cour des comptes. Les conseils appellent depuis longtemps à une plus grande coopération, et ce dans le respect des compétences de chacun. La discussion des politiques SDG par SDG dans le VNR ne correspond pas à ce que ce VNR devrait être : une évaluation honnête de ce qui s’est passé depuis 2017, de ce qui va bien et de ce qui ne va pas bien, et de ce qu’il faut faire pour atteindre l’objectif contenu dans les SDGs. Le texte n’est guère plus qu’une longue liste de plans et d’intentions qui semble suggérer que tout va bien, ce qui n’est pas le cas.

En l’état, le projet de texte examiné par les conseils consultatifs n’a pas une grande pertinence politique. Les conseils demandent instamment que l’on continue à travailler sur un texte de qualité suffisante à soumettre à l’ONU. Les conseils demandent également à la CIMDD d’organiser une consultation avec eux avant la finalisation de la version finale du VNR, afin de permettre un dialogue ouvert sur les conclusions du présent avis.

  

1. Contexte

  • [1] Lors du Forum politique de haut niveau (High-Level Political Forum, HLPF)[1] en juillet 2023,[2] notre pays présentera pour la deuxième fois un Examen National Volontaire (Voluntary National Review, VNR)[3] aux membres des Nations Unies.[4] Par le biais d’un tel VNR, un pays explique comment il met en œuvre l’Agenda 2030 pour le développement durable (Agenda 2030),[5] qui comprend les Objectifs de développement durable (Sustainable Development Goals, SDGs[6]).
  • [2] La Belgique a présenté un premier VNR en juillet 2017.[7] Quelques conseils consultatifs ont ensuite rendu un avis[8] sur le texte du VNR.
  • [3] Les États membres qui présentent un VNR reçoivent un manuel[9] de l’ONU sur la manière dont le rapport doit être préparé.
  • [4] En Belgique fédérale, c’est la Conférence interministérielle pour le développement durable (CIMDD) qui est responsable de l’élaboration du rapport. Entre la publication du précédent VNR en 2017 et le redémarrage de la CIMDD au printemps 2022, il n’y a pas eu de fonctionnement normal de la CIMDD. (Il n’y a pas eu de réunions entre septembre 2017 et mai 2022). De plus, la Stratégie nationale de développement durable[10] envisagée, dont l’un des objectifs était de donner une impulsion à la mise en œuvre de l’Agenda 2030 par le biais d’activités visant à évaluer les progrès, n’a pas été mise en œuvre comme convenu. De même, le groupe de travail dédié à la cohérence des politiques qui devait être mis en place au sein de la CIMDD (tel que stipulé dans le Plan fédéral de développement durable) n’a pas non plus été mis en place.[11]
  • [5] La CIMDD a entamé le processus VNR le 5 mai 2022. Un plan d’action plus détaillé a été convenu le 13 juillet 2022. Ces accords mettaient notamment l’accent sur la participation de la société civile. Au cours de l’été 2022, les membres de divers conseils consultatifs de notre pays, ainsi qu’un groupe plus large d’organisations, ont été invités à apporter leur contribution. Ces contributions ont été recueillies et résumées dans des synthèses pour chaque groupe de la société civile.[12] Le 4 octobre 2022 a eu lieu le SDG Forum[13]. Au cours de cet événement, des discussions ont eu lieu sur la contribution de différents groupes de la société civile au processus VNR (à la demande de la société civile). Le 13 février 2023, la CIMDD a demandé à une série de conseils consultatifs de produire un avis sur le projet de VNR pour le 14 avril.[14]
  • [6] Le projet de texte du VNR qui fait l’objet de cet avis n’est pas encore un document complet. Plusieurs chapitres sont encore manquants ou n’avaient pas été entièrement finalisés au moment où le processus consultatif a pu commencer. Toutefois, les conseils consultatifs concernés ont finalisé un avis  dans le temps limité prévu.

 

2. Évaluation du projet du VNR 2023

2.1 L’importance d’un Voluntary National Review

  • [7] Que notre pays présente un deuxième VNR au HLPF est en principe positif. Les conseils soutiennent ce choix. Le processus décidé par la CIMDD est une invitation à prendre au sérieux l’élaboration d’un VNR. Notre pays a besoin d’un véritable processus d’apprentissage, d’évaluation et d’ajustement. En effet, tous les rapports récents[15] montrent qu’il existe encore de sérieux goulets d’étranglement dans la réalisation des SDGs. Un VNR n’est pas seulement une occasion de présenter notre pays dans un forum international. Il devrait également s’agir d’un outil permettant une réflexion interne, une évaluation comparative et un retour d’information au niveau international, et enfin des réponses transformatrices plus solides aux grands défis qui ont donné naissance à l’Agenda 2030.

2.2 Le processus participatif en préparation du VNR

  • [8] Les conseils apprécient le choix de la CIMDD de faire plus de place à la participation de la société civile pour la VNR 2023, et ce à un stade précoce de l’élaboration du VNR. Il s’agit clairement d’une amélioration par rapport à 2017.
  • [9] Cependant, la manière dont cette participation a dû être organisée (par le CFDD) n’était pas optimale, et ce à différents niveaux. Tout a été mis en œuvre pour tirer le meilleur parti de l’enquête auprès des organisations de la société civile et de la préparation des discussions lors du SDG Forum. Avec une meilleure préparation par la CIMDD, il aurait été possible d’augmenter la confiance des citoyens concernés et de la société civile dans le processus de participation.
  • [10] Les conseils apprécient la décision de principe de la CIMDD de consacrer un chapitre spécifique du VNR à la contribution de la société civile. Le CFDD a été invité à rédiger lui-même ce texte au début de l’année 2023. Il est positif que cela donne à la société civile l’opportunité d’apporter sa contribution dans des termes qu’elle choisit elle-même, y compris sur sa propre contribution à la réalisation des SDGs. En même temps, on a l’impression que les autorités concernées n’ont que peu ou pas utilisé les contributions de la société civile. Cette contribution devait être disponible pour le 15 octobre 2022 et a également été livrée à temps. Cependant, la CIMDD n’a fourni aucun retour d’information sur la manière dont cette contribution a été incorporée dans le texte des autorités. Dans leurs contributions au VNR, les différentes autoritéss n’indiquent nulle part comment ils ont ou n’ont pas pris en compte les contributions et les attentes des organisations de la société civile lors de la rédaction du VNR. Cela donne l’impression que l’ensemble de l’exercice de participation n’a eu que peu ou pas d’influence sur le texte même du VNR. Les conseils demandent donc qu’un effort soit fait lors de la rédaction de la version finale du VNR pour valoriser au mieux les contributions du processus participatif (y compris le présent avis).

2.3 Préparation par les autorités

  • [11] La qualité du texte du VNR soumis aux conseils consultatifs ne peut être dissociée de la manière dont les différents gouvernements ont géré le processus de mise en œuvre des SDGs entre 2017 et 2023. En général, un premier VNR constitue une sorte de ‘mesure de référence’. Il est plus ou moins habituel pour chaque État membre de proposer un VNR deux fois au cours d’un cycle politique. Un deuxième VNR est alors plus de nature évaluative, examinant de manière critique ce qui a été fait ou non pour remédier aux points d’amélioration par le biais de politiques actives. C’est principalement cette évaluation qui devrait être faite lors du deuxième VNR. En principe, il ne s’agit pas de se contenter de recueillir une liste générale des intentions des différentes autorités. Pour qu’une telle évaluation soit possible, des accords ont été conclus après le précédent VNR pour jeter les bases d’une telle évaluation approfondie via la Stratégie nationale de développement durable et un certain nombre d’événements. Toutefois, ce processus n’a pas eu lieu comme prévu.
  • [12] Si la CIMDD n’avait pas été à l’arrêt entre 2017 et 2022 et avait pu continuer à fonctionner comme prévu, les conditions de préparation d’un deuxième VNR à part entière auraient probablement été plus favorables.[16] Les conseils regrettent que la CIMDD n’ait pas été en mesure d’assurer une coordination globale de la stratégie nationale. Entre-temps, de nouvelles dispositions ont été prises et le fonctionnement de la CIMDD a été réactivé.[17]

2.4 Discussion par chapitre du projet de texte

Chapitre 1 | Déclaration liminaire

  • [13] Ce chapitre n’est pas encore disponible dans le texte soumis du VNR.

Chapitre 2 | Point saillants

  • [14] Ce chapitre n’est pas encore disponible dans le texte soumis du VNR.

Chapitre 3 | Introduction

  • [15] Cette introduction cite certains éléments clés concernant la configuration de ce deuxième VNR. Par exemple, elle indique que le VNR devrait donner un aperçu de « l’évolution de l’effort depuis 2017, ainsi que les nouvelles initiatives, les progrès et les défis». Le VNR devrait également « mobiliser toutes les parties prenantes publiques et privées afin d’accélérer la mise en œuvre et de combler les lacunes ». Le reste du texte ne répond pas encore complètement à cette intention. Il n’est souvent qu’une liste de plans et d’intentions et, sous cette forme, ne constitue pas un levier pour accélérer la mise en œuvre ambitieuse des SDGs.

Chapitre 4 | Méthode et processus de préparation

  • [16] Ce chapitre indique que les contributions de la société civile au VNR ont été incluses sur le site web sdgs.be. Cela ne semble pas être le cas à ce jour. Toutefois, ces contributions peuvent être trouvées sur le site web du CFDD. Comme indiqué précédemment, ces contributions devraient non seulement constituer un chapitre distinct du VNR proprement dit, mais aussi, le cas échéant, être intégrées dans les différents autres chapitres.

Chapitre 5 | Politiques publiques et environnement facilitateur

  • [17] Ce chapitre illustre à certains égards des lacunes qui ont déjà pu être identifiées dans le cadre du processus VNR 2017 et de l’audit de la Cour des comptes sur la mise en œuvre des SDGs dans notre pays. Il semble que les différents niveaux politiques s’efforcent de présenter leurs propres pratiques politiques et la coopération entre eux de la manière la plus positive possible, et en particulier comme une mise en œuvre des SDGs, alors que ce n’est pas toujours le cas.
    • La présentation par les niveaux politiques individuels confirme qu’il n’existe pratiquement aucune coopération structurelle entre les gouvernements concernés. Que chaque niveau politique ait sa propre vision de la mise en œuvre des SDGs est logique en soi. Mais dans l’esprit de l’Agenda 2030, et compte tenu des nombreuses interférences entre les niveaux politiques dans la réalisation des SDGs, il serait logique que les gouvernements de ces niveaux politiques travaillent ensemble à partir de leurs propres compétences et se renforcent mutuellement pour ce qui devrait être essentiellement un processus holistique, dans l’esprit du principe de cohérence des politiques pour le développement durable.[18] Il devrait être normal que les différents niveaux politiques apprennent activement les uns des autres et partagent leurs expériences et leurs bonnes pratiques. Une CIMDD qui fonctionne bien pourrait jouer un rôle clé à cet égard. En ce sens, il est assez cynique de dire que la description des « mécanismes institutionnels » (dans la partie e) semble suggérer à un lecteur externe que ces mécanismes sont normaux et fonctionnent bien. Ce n’était en tout cas pas le cas entre 2017 et 2022.
    • Le texte révèle également quelques différences. Il semble ainsi que dans la région flamande, l’inspiration de la stratégie flamande de développement durable ne soit guère restée dans les faits.[19] Il ne semble pas que les SDGs aient été une boussole pour arriver à une politique intégrée, mais plutôt que la politique stratégique qui avait déjà été choisie prétend maintenant garantir la mise en œuvre des SDGs. En Région wallonne, il semble y avoir une intégration plus structurelle des politiques de développement durable, avec un cadre plus fort pour suivre la mise en œuvre de cette stratégie et aussi une culture plus performante de la participation des citoyens et de la société civile.
    • La description du processus de « participation des parties prenantes » semble refléter des réalités très différentes. Si, dans un cas, il s’agit de la participation des représentants de la société civile, dans l’autre cas, la signification de ce terme n’est pas aussi claire. Par exemple, c’est en soi une très bonne chose que le gouvernement flamand soutienne les initiatives des gouvernements locaux en termes d’intégration des SDGs dans les politiques. Cette opération locale est un exemple au niveau international. Mais cela est différent de ce que la description « une approche participative et holistique » semble suggérer. La participation devrait inclure l’implication des citoyens et de la société civile, l’augmentation de ‘l’appropriation’ en termes d’objectifs et d’actions, …. Cet aspect est beaucoup moins abordéi.
    • Bien que le mot « cohérence » soit mentionné ici et là, une section spécifique sur la cohérence des politiques pour le développement durable (PCSD) aurait été appropriée dans ce chapitre. En effet, la PCSD est une épine dorsale importante de toutes les actions en faveur de l’Agenda 2030, tant dans sa dimension interne (en Belgique) qu’externe (vers le reste du monde).
    • La raison pour laquelle les composantes « intégration des trois dimensions du développement durable » et « actions transformatives » n’ont pas été élaborées n’est pas claire, pas plus que la signification exacte de la phrase « sera développé ultérieurement si nécessaire». N’y a-t-il pas eu suffisamment de temps pour intégrer les contributions des différents niveaux politiques ou y a-t-il une autre raison ?
    • L’inclusion de la section sur la Cour des comptes est une partie importante du VNR. Du point de vue de la transparence de l’auto-évaluation, c’est une bonne chose que cela figure dans le rapport. Les conseils trouvent les recommandations formulées par la Cour des comptes très éclairantes et demandent aux gouvernements coresponsables du VNR non seulement de mentionner cet audit mais aussi d’y donner suite en indiquant concrètement comment les recommandations de la Cour ont été satisfaites, et – si elles ne l’ont pas été – en indiquant les raisons pour lesquelles cela n’a pas été fait et quelles mesures seront encore prises.

Chapitre 6 | Progrès réalisés par rapport aux objectifs et cibles[20]

  • [18] Ce chapitre devrait être le véritable cœur du VNR. La qualité de cette section devrait montrer si les leçons tirées du premier VNR de 2017 ont été intégrées. On devrait lire ici ce que promet le titre de ce chapitre, à savoir une évaluation critique et transparente des progrès réels dans la mise en œuvre des objectifs et une auto-évaluation critique des politiques menées ces dernières années. En résumé, on ne peut que constater que ce chapitre ne répond quasiment pas à cette intention. Il semble que les gouvernements concernés veuillent surtout citer toutes sortes d’initiatives et de plans qui devraient prouver que la politique progresse et obtient des résultats. Or, cette affirmation n’est nullement étayée, bien au contraire. Immédiatement sous le titre, on peut lire que « les bonnes pratiques de chaque entité sont examinées sous différents sous-thèmes avant de conclure par une brève section sur les défis ». Et c’est aussi ce que l’on trouve dans les textes, mais cela ne répond pas à l’objectif d’un VNR et aux attentes des conseils.
  • [19] Qu’attendent les conseils de ce chapitre dans son ensemble et des discussions sur les SDGs ?
    • Une analyse approfondie de la situation de notre pays en 2017 et de ce qui s’est passé ou ne s’est pas passé depuis. Cela devrait inclure les SDGs qui présentaient les plus grands goulets d’étranglement en 2017, les politiques qui ont été élaborées depuis lors pour y répondre et les résultats obtenus.[21] Cette analyse n’est pas faite, bien au contraire.
    • Un reflet fidèle des progrès réels dans la mise en œuvre des SDGs. C’est une bonne chose en soi que chaque fois que chaque SDG est discuté, une brève présentation des indicateurs soit d’abord donnée. Cependant, il n’y a pas de lien entre le texte proprement dit et l’image présentée par ces indicateurs. La CIMDD devrait au moins présenter une évaluation globale de la situation dans un VNR. Plusieurs rapports du Bureau fédéral du Plan, entre autres, montrent qu’il n’y a pas encore d’image générale positive.[22] L’évaluation qui devrait être faite par les gouvernements ne peut être trouvée que de manière limitée dans la section « défis » pour chaque SDG. En outre, la manière dont ces défis sont détaillés dans le texte accompagnant chaque SDG n’est pas claire. Souvent, ces textes sont encore incomplets ou trop sélectifs, omettant des aspects importants. Il est important de renforcer qualitativement ces sections de texte.
    • Un compte-rendu précis et fidèle des politiques réellement menées et de la manière dont elles ont ou n’ont pas impliqué une coopération entre les différents niveaux politiques et avec les partenaires. Ainsi, on pourrait s’attendre à un compte-rendu fidèle, par exemple, du processus du Plan national énergie et climat et des raisons pour lesquelles on ne parvient pas à mettre en place une politique cohérente, complémentaire et suffisamment ambitieuse.[23] Le lecteur qui ne dispose pas de ce contexte pourrait penser qu’il existe en Belgique des politiques complémentaires et qui se renforcent mutuellement.
    • Une discussion plus complète des différentes initiatives autour des SDGs. On remarque que le texte des gouvernements traite principalement des processus gouvernementaux. Par exemple, les contributions sur la politique flamande ne mentionnent pas, entre autres, les différents « Green Deals » avec les secteurs et les réseaux et les arènes ou plateformes de transition, telles que l’ « arène de transition pour l’eau » ou la « plateforme de transition espaces ouverts ».
    • Une réflexion de la CIMDD sur les contributions de la société civile reflétant les attentes des différents groupes de la société civile concernant les politiques VNR et SDG. Ces contributions sont disponibles depuis le début du mois d’octobre. En principe, les gouvernements ont donc eu suffisamment de temps pour élaborer une réponse qui aurait renforcé la confiance des organisations de la société civile dans le processus.
    • Plus d’attention sur la cohérence des politiques en faveur du développement durable. Le fait que des initiatives internationales soient mentionnées pour un certain nombre de SDGs est une bonne chose en soi. Toutefois, il devrait aller de soi que pour chaque SDG, les effets (positifs et négatifs) à l’étranger des choix politiques opérés dans le pays et les effets transversaux sur d’autres domaines politiques devraient être pris en considération. Il conviendrait également de mentionner les initiatives qui répondent aux effets négatifs à l’étranger des choix politiques effectués dans le pays. La cohérence des politiques est désormais mentionnée en tant que principe institutionnel (dans la discussion sur l’ODD 17), mais n’est pas systématiquement appliquée. Il est également frappant de constater qu’aucune initiative de la Communauté française ou de la Région wallonne n’est mentionnée parmi les actions internationales.
    • Une situation et une comparaison internationales. Il serait intéressant, pour les SDGs dans leur ensemble et pour les SDGs individuels, de faire des comparaisons avec d’autres pays (par exemple en se référant à des comparaisons internationales[24] existantes ou en invitant d’autres pays à faire leur analyse des politiques de notre pays et à inclure cette analyse dans leur propre VNR). La feuille de route de la CIMDD ne mentionne qu’un éventuel examen par les pairs après le HLPF, lors du SDG Forum 2023.

 Chapitre 7 | Mise en œuvre des SDGs au niveau local

  • [20] Il est intéressant de noter que le VNR comprend un chapitre sur les autorités locales. Ce texte a été rédigé par les autorités locales et leurs organisations faîtières et n’est donc pas, en principe, de la responsabilité de la CIMDD. Ce chapitre contient beaucoup d’informations et d’exemples intéressants.
    • Il est frappant, par exemple, de constater qu’à de nombreux endroits de ce texte, il y a bien une auto-évaluation critique, indiquant les points positifs et négatifs ainsi que les améliorations à apporter. C’est moins le cas dans le texte des autorités régionales et fédérale.
    • Il est également intéressant de noter que les différences entre les régions en termes d’exploitation du potentiel de l’Agenda 2030 peuvent être calmement soulignées.
    • Il est également frappant de constater qu’il y a un plaidoyer clair pour « des formes innovantes de coopération et un partenariat total, tant entre les différents niveaux politiques de notre pays qu’avec des partenaires en Europe et dans le monde» (p. 73). Dans un tel esprit de coopération, il est parfaitement possible, par exemple, que les expériences positives des communes flamandes en termes d’intégration des SDGs dans les instruments du cycle politique et de gouvernance puissent être partagées ouvertement avec les communes d’autres régions. Cette attitude est conforme à l’esprit des SDGs.[25]
  • [21] Il est important de s’assurer – dans cette section et dans les autres sous la responsabilité des autorités – que si l’on fait référence aux organisations de la société civile existantes, on le fasse de manière équilibrée (par exemple, dans le cas d’un groupe sociétal, ne pas mentionner qu’une organisation en particulier, mais toujours veiller à garder l’équilibre).

Chapitre 8 | Défis nouveaux et émergents

  • [22] Ce chapitre n’est pas encore disponible. Les conseils ont du mal à comprendre cela. Ils partent du principe que ce chapitre sera certainement encore développé en profondeur.

Chapitre 9 | Outils de mise en œuvre

  • [23] Ce chapitre est difficile à interpréter. Il contient un aperçu intéressant de l’évolution des dépenses de la coopération belge au développement, ainsi que quelques bonnes pratiques du monde financier et, enfin, quelques éléments sur les régions. Cependant, il manque une vue d’ensemble des ressources (financières et humaines) allouées au développement durable par chaque gouvernement. Il semble que ce chapitre ne soit pas encore finalisé. Il est difficile pour un lecteur d’en comprendre la structure. Sous cette forme, le chapitre ne répond en tout cas pas aux exigences du manuel VNR.[26]

Chapitre 10 | Conclusion et étapes suivantes

  • [24] Ce chapitre n’est pas encore disponible. L’on peut comprendre les contraintes de temps dans lesquelles la CIMDD doit travailler et la complexité de l’exercice. Il est par contre difficile de donner un avis sur un projet de VNR alors que l’on ne sait pas encore très bien ce que la CIMDD elle-même formulera en conclusion de l’ensemble du processus. Les conseils espèrent que le document final et le VNR dans son ensemble montreront que ce deuxième VNR, lorsqu’il sera finalisé, constituera effectivement un progrès par rapport au premier VNR.[27]

Annexe 1 | Statistiques

  • [25] Cette annexe est le résultat des travaux de l’Institut interfédéral de statistique. Dans son ensemble, elle contient beaucoup d’informations utiles et pertinentes. Il serait bon pour la qualité du VNR que les contributions des différents gouvernements (au chapitre 6) abordent plus activement les constats révélés par ces indicateurs. En outre, il serait également utile de se référer au « Spillover Index » qui donne une indication des externalités internationales.[28]
  • [26] La feuille de route de la CIMDD indiquait qu’il y aurait eu un « échange de vues entre les experts des Conseils d’avis sur les indicateurs de suivi des SDGs » à l’automne 2022. Cet échange n’a pas eu lieu. Les conseils supposent que cette consultation sera lancée avant la finalisation du VNR et qu’un rapport sur les résultats de cette consultation sera ajouté à l’annexe.

2.5 Évaluation globale

  • [27] Le document sur lequel la demande d’avis a été formulée est manifestement toujours inachevé. Les conseils en sont déçus. Les organisations de la société civile ont fait de gros efforts pour apporter leur contribution, et l’ont fait dans les délais prévus. Elles supposaient qu’elles auraient reçu au moins un projet complet de la CIMDD. Cela n’a pas été le cas.
  • [28] Sur la base des chapitres disponibles, l’évaluation des conseils n’est pas positive. Le document ne contient pas d’analyse fidèle et ne permet donc pas de porter un jugement solide sur les politiques des SDGs menées par les différents gouvernements. Par rapport au premier VNR, qui était principalement une mesure de référence, ce deuxième VNR aurait dû constituer un net progrès. Ce deuxième VNR aurait dû être de nature évaluative, dans un esprit ouvert d’autocritique.[29] Cela n’est absolument pas le cas dans le texte. Il serait encourageant que les différents gouvernements de notre pays profitent de cet exercice VNR pour aboutir à une coopération concrète visant à une bonne politique de développement durable, avec plus de volonté politique et dans le respect des compétences de chacun. La coopération devrait être l’essence même de la mise en œuvre de l’Agenda 2030.
  • [29] En l’état, ce VNR n’a que peu ou pas de pertinence politique supplémentaire et ne peut mobiliser les citoyens et les groupes sociétaux. Les conseils demandent instamment la poursuite des travaux sur un texte de qualité suffisante pour être soumis avec conviction aux Nations Unies.

3. Suivi

  • [30] Les conseils supposent qu’avant même la finalisation du texte du VNR, ils seront informés par la CIMDD de la manière dont cet avis a conduit à un ajustement et, espérons-le, à une amélioration de la qualité du texte par rapport à la version sur laquelle ils ont formulé cet avis. À cet égard, les conseils demandent à la CIMDD de prendre une initiative. Une formule concrète pourrait être, par exemple, une table ronde au cours de laquelle des représentants de la société civile pourraient entamer un dialogue avec la CIMDD. Cette table ronde pourrait être organisée par le CFDD à la demande de la CIMDD.

 

 

 

 

[1] High-Level Political Forum on Sustainable Development: https://hlpf.un.org/home

[2] HLPF 2023, 10-19 juillet 2023, New York: https://hlpf.un.org/2023

[3] Voluntary National Review: https://hlpf.un.org/vnrs

[4] Cette décision a été prise par la CIMDD le 5 mai 2022.

[5] Agenda 20230: https://sdgs.un.org/2030agenda

[6] Sustainable Development Goals: https://sdgs.un.org/goals

[7] VNR 2017: https://hlpf.un.org/countries/belgium/voluntary-national-review-2017

[8] Avis sur le rapport belge pour la Voluntary National Review 2017 (CFDD, 2017a05): https://frdo-cfdd.be/fr/avis/05-avis-sur-le-rapport-belge-pour-la-voluntary-national-review-2017/

[9] Handbook for the preparation of Voluntary National Reviews – The 2023 Edition. https://hlpf.un.org/sites/default/files/vnrs/hand-book/VNR%20Handbook%202023%20EN_0.pdf

[10] Stratégie nationale de développement durable, voir : https://sdgs.be/fr/la-politique/politique-nationale

[11] Le plan fédéral de développement durable stipule : « Afin de renforcer les connaissances et l’échange des pratiques et instruments entre services publics, la CIDD établira, dès 2021, un nouveau groupe de travail dédié à la cohérence des politiques. Ce groupe de travail visera notamment à proposer au niveau politique une analyse transversale des plans. Ce groupe de travail coordonnera également, sous la responsabilité de la DGD, des points focaux départementaux chargés d’assurer la CPD16 , une partie indispensable de la Cohérence des Politiques pour un Développement Durable (CPDD). Il assurera une relation suivie avec le Conseil consultatif sur la cohérence des politiques en faveur du développement. Enfin, ce groupe de travail abordera l’amélioration de la coordination entre les plans fédéraux. » (p. 26)

[12] Le résultat de cette enquête peut être consulté sur cette page du site web du CFDD: https://frdo-cfdd.be/fr/actualites/contribution-de-la-societe-civile-a-lexamen-national-volontaire-2023/

[13] SDG Forum, 4 octobre 2022, Flagey, Bruxelles: https://sdgforum.be/

[14] La décision de la CIMDD indique : « Il sera donc demandé au CFDD de coordonner un avis commun avec les organes consultatifs indiqués dans le plan d’approche, à savoir le Minaraad, le SERV, le CESE Wallonie, Brupartners, le Conseil environnement de la RBC et le Wirtschafts- und Sozialrat. »

[15] Voir par example: Sustainable development in the European Union – 2022 edition. https://ec.europa.eu/eurostat/web/products-flagship-publications/-/ks-09-22-019

[16] L’audit que la Cour des comptes a réalisé sur tout cela en 2020 fournit une interprétation. La conclusion (p. 71) indique : « La Conférence interministérielle du développement durable (CIMDD), qui regroupe tous les ministres concernés tels que désignés par décision du comité de concertation, devrait assurer une coordination globale, mais elle ne se réunit plus depuis septembre 2017. La stratégie nationale élaborée par la Conférence en 2017 ne contient pas d’objectifs spécifiques et les chantiers de coopération prévus portent surtout sur les processus et ne sont pas assortis d’objectifs chiffrés. » | Objectifs de développement durable – Programme 2030 de l’ONU : mise en oeuvre, suivi et rapportage par les pouvoirs publics en Belgique (preparedness review) https://www.ccrek.be/FR/Publications/Fiche.html?id=d9bed076-9ed1-4bf5-93b9-faab34ac30de

[17] Le gouvernement flamand a présidé la CIMDD entre 2017 et 2022. Le rapport de la Cour des comptes indique : « En principe, la présidence de la CIMDD passe tous les six mois à un pouvoir public différent. À la suite de discussions au sujet de la présidence d’autres conférences interministérielles, l’alternance a été supprimée en 2015 pour l’ensemble des conférences. Le gouvernement flamand, qui présidait la CIMDD à ce moment-là, est ainsi resté président intérimaire, mais n’exerce plus cette présidence de manière active depuis début 2018. La dernière réunion de la CIMDD date du 13 septembre 2017. » Après une concertation mutuelle entre les niveaux politiques, la CIMDD a été réactivée à l’initiative du gouvernement flamand, avec une réunion le 5 mai 2022. De début octobre 2022 à fin septembre 2023, le gouvernement fédéral préside la CIMDD. Après cela, ce sera le tour du gouvernement wallon.

[18] Le SERV a récemment lancé un appel pour une meilleure coopération entre niveaux de pouvoir, se renforçant ainsi mutuellement: https://serv.be/serv/persberichten/oproep-betere-samenwerking-tussen-vlaamse-en-federale-niveau-en-andere-gemeenschappen-en-gewesten

[19] Voir à ce sujet l’avis 2021 du MinaRaad et du SERV sur la quatrième stratégie flamande de développement durable :: https://www.minaraad.be/themas/bestuurskwaliteit/visiedocument-vsdo-4-adviesvraag et https://serv.be/serv/publicatie/advies-vlaamse-strategie-duurzame-ontwikkeling-vsdo4 .

[20] Le texte néerlandais comprend également « et évaluation des mesures politiques prises jusqu’à présent ».

[21] Voir, par exemple, ce que dit le VNR Handbook: “The consideration of Goals could focus on trends, successes, critical challenges, interlinkages, synergies and trade-offs, emerging issues, and lessons learned, and describe what actions have been taken to address existing gaps and the challenges that have been identified.” (p. 29)

[22] Par exemple, le récent rapport Indicateurs de développement durable 2023. Le communiqué de presse résume ce rapport comme suit: « Pour analyser la position de la Belgique en matière de développement durable, le Bureau fédéral du Plan a examiné 51 indicateurs. Pour seulement 20 des 51 indicateurs, notre pays est en bonne voie pour atteindre les objectifs de développement durable. »  https://www.plan.be/publications/publication-2316-fr-indicateurs_de_developpement_durable_2023 . Le rapport fédéral sur le développement durable 2022 arrive à une conclusion similaire : « Il ressort de l’évaluation des tendances de 51 indicateurs que la Belgique n’atteindra pas ces objectifs en 2030 si les tendances actuelles se poursuivent. » https://www.plan.be/publications/publication-2295-fr-plus_que_huit_ans_pour_realiser_les_sdg_rapport_federal_sur_le_developpement_durable_2022 .

[23] C’est ce qu’a récemment souligné un avis rendu par sept des conseils consultatifs de notre pays. Voir : https://frdo-cfdd.be/fr/actualites/sept-conseils-consultatifs-de-tout-le-pays-appellent-a-une-plus-grande-cooperation-pour-des-politiques-energetiques-et-climatiques-coherentes-et-ambitieuses/

[24] Outre le rapport d’Eurostat déjà mentionné, par exemple, le Sustainable Development Report 2022: https://www.sdgindex.org/reports/sustainable-development-report-2022/

[25] Le rapport de l’OCDE sur la politique de la Flandre en matière des SDGs contient également cette recommandation: “Use the SDGs as a framework to enhance strategic alignment between federal, regional, provincial and municipal sustainable development strategies. The 2030 Agenda should also be used to strengthen interaction with stakeholders and coherence between internal and external actions, in particular between territorial development policy in Flanders and decentralized development co-operation activities.” (p. 13). Zie: https://www.oecd-ilibrary.org/urban-rural-and-regional-development/a-territorial-approach-to-the-sustainable-development-goals-in-flanders-belgium_cb4fb76b-en

[26] Handbook, p. 32: “The review process should discus show means of implementation are mobilized, what difficulties are being encountered, and what additional resources are needed to implement the 2030 Agenda, looking at the full range of financing sources (public/private, domestic/international) and non-financing means of implementation, such as capacity development and data needs, technology, and partnerships. Gender-responsive budgeting can be highlighted, if applicable.”

[27] Le dernier paragraphe du premier VNR belge contient cette conclusion, qui est en même temps un mandat pour le processus qui aurait dû aboutir au deuxième VNR: “Given the challenges related to undertaking a full-fledged review of progress and impact covering the full breadth and depth of this agenda, this first edition of the Belgian NVR should be considered primarily as a stocktaking exercise, a starting point providing us with a partial baseline (shaped by the statistical annex below) and a benchmark: for guiding further action in a federal context with multiple decision-makers hence multiple priorities per policy area; for future gap analysis, progress monitoring and impact assessment; for improving collaboration with civil society in the implementation and review of SDGs; and for strengthening accountability towards parliaments, civil society as well as the Belgian population at large.” (p. 74)

[28] Cet indice fait partie du Sustainable Development Report 2022: https://dashboards.sdgindex.org/map/spillovers .

[29] Les lignes directrices adoptées par la CIMDD elle-même, mentionnées au chapitre 4, prévoient « une évaluation juste et critique des réalisations ». Le texte n’est donc pas à la hauteur de ses propres ambitions.

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